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LE SYNDICAT

Elections 2007 : le SNJ interpelle les politiques

Ségolène Royal (PS)

Réponses des candidats à l’Elysée

Vous avez bien voulu m’interroger sur la situation de la presse, et notamment sur les mesures qu’il conviendra de prendre pour garantir la situation des journalistes en particulier, et plus généralement pour assurer une véritable information pluraliste. Comme je l’ai maintes fois exprimé, je suis très attachée à l’indépendance de la presse et des médias et la garantie d’indépendance des journalistes en est la condition essentielle.

La presse contribue à l’information des citoyens et à la diffusion des courants de pensée et d’opinion. La presse écrite notamment, est aujourd’hui dans une position difficile pour des raisons externes, liées par exemple aux difficultés de distribution, à un prix élevé au numéro, à une culture de lectorat peu développée, ou à une publicité qui s’oriente vers d’autres supports. Mais il existe aussi des raisons internes, insuffisance des investissements, ou faiblesse de l’innovation éditoriale.

Je ferai en sorte que la presse écrite puisse trouver un environnement favorable à son renouveau grâce à deux séries de mesures. En premier lieu, une réforme des financements publics, avec notamment une indexation des aides sur de nouveaux critères (importance du rédactionnel, nombre de journalistes) et un volet fiscal visant à réduire le prix au numéro et à l’abonnement. En second lieu, de nouvelles orientations structurantes telles que la création d’un statut des entreprises de presse, s’apparentant à celui des Fondations, peuvent garantir aux titres qui le souhaitent une indépendance économique et donc éditoriale.

Une réponse au problème des fonds propres des entreprises de presse peut également être envisagée grâce à un nouveau mécanisme de déduction fiscale incitant les particuliers à rejoindre les sociétés de lecteurs.

Assurer le pluralisme et l’indépendance de l’information signifie bien entendu un renforcement des droits des journalistes et des salariés dans toutes les entreprises médiatiques, qu’elles soient associatives, publiques ou privées. Ceci passe notamment :

- par la reconnaissance juridique de l’équipe rédactionnelle dans toute entreprise de presse ;

- par la garantie d’un véritable statut à la profession de journaliste et la résorption des emplois précaires, notamment l’application de toutes les dispositions légales et conventionnelles protégeant les pigistes qui concerne de plus en plus de professionnels aujourd’hui - et je souhaite que soit engagée une concertation avec les organisations concernées à ce sujet ;

- par la nécessaire protection des sources, qui doit être évidemment garantie. Ainsi, je souhaite que soient inscrites dans la loi de 1881 sur la liberté de la presse les dispositions prévues à l’article 109 du code de procédure pénale et à en étendre la portée aux journalistes en ligne et journalistes blogeurs exerçant sur internet. Par ailleurs, je crois indispensable d’élargir les modalités de perquisition prévues à l’article 56-2 du code de procédure pénale aux perquisitions effectuées au domicile des journalistes. De même, concernant la notion de « recel de violation du secret de l’instruction », l’usage fait aujourd’hui par les parquets de cette notion est contraire à la jurisprudence récente de la 17ème chambre du tribunal correctionnel de Paris et a d’ailleurs été condamné par la Cour européenne des droits de l’homme en 1999. Je m’engage donc à modifier les textes existants sur ce point de manière à ce que l’usage abusif de cette notion contre la presse ne puisse plus être possible. Il en va, là encore, de la liberté d’exercice de la profession de journaliste.

Mon objectif est également, si je suis élue, d’envisager un dispositif anti-concentration pour les médias afin d’assurer la diversité des contenus et un pluralisme réel, et notamment en matière d’information, sans interdire le développement de groupes français multimédia puissants, capables de faire face à la concurrence internationale.

A l’évidence, la majorité actuelle poursuit une politique engagée depuis 2002 pour renforcer la concentration au seul profit des grands groupes. A cela s’ajoute le fait que le dispositif anti-concentration, qui date pour l’essentiel de 1986, n’a pas su anticiper les problèmes posés en matière de diversité et de pluralisme par l’évolution du secteur des médias.

On ne peut continuer à laisser quelques grands groupes s’emparer progressivement de tous les médias : à cet effet, il faudra qu’une nouvelle loi rende pertinents les seuils de concentration autorisés. Un dispositif anti-concentration plus efficace consistera à limiter la part de capital pouvant être détenue dans un média par un groupe industriel dont l’activité provient pour partie de commandes publiques, et instituer un plafond de part d’audience réelle et reconnue ainsi qu’un plafond en matière de recettes publicitaires dégagées par un même groupe pour limiter la concentration horizontale des sociétés de télévisions et sauvegarder le pluralisme.

Je souhaite enfin un audiovisuel public fort, garant du pluralisme, et une télévision de qualité ce qui doit se traduire par une télévision au service du public, qui puisse enfin se différencier des chaînes commerciales, approfondir son identité en termes de qualité et d’originalité de programmes.

J’observe que des dérives se sont produites depuis la loi de 2000 du gouvernement Jospin qui a renforcé le pôle public avec la création de France télévisions. Ces dérives ne vont pas dans le sens du développement d’un média populaire, créatif, au service de la cohésion sociale, garant de la diversité, des opinions et des sensibilités. De plus, la modification du paysage audiovisuel avec l’arrivée de la TNT, ainsi que la création de la chaîne internationale, ne s’est pas faite en maintenant un équilibre réel entre les chaînes privées et le groupe public. Des corrections significatives doivent être engagées par des mesures législatives et par une renégociation du contrat d’objectif et de moyens de France télévisions qui n’est pas à la hauteur des enjeux, en particulier compte tenu des importants investissements à consentir sur le plan technologique.

Pour réaliser cette ambition, je souhaite un rééquilibrage du financement afin de limiter la course aux recettes publicitaires qui annihile toute velléité de résistance à la banalisation. Pour les chaînes publiques, en plus de la redevance, une nouvelle assiette de la taxation des recettes publicitaires, des chaînes privées, des nouveaux médias, fournisseurs d’accès internet et opérateurs téléphoniques doit servir de base à une remise à niveau des moyens de la télévision publique qui souffre de sous financement chronique. Ainsi le service public des médias pourra bénéficier de ressources nouvelles sans alourdir pour autant le montant global des prélèvements obligatoires.

Je m’engage également à établir une Haute autorité du pluralisme dont les membres seront désignés par le Parlement à une majorité des 3/5èmes. Cette institution remplacera le CSA qui ne remplit pas son rôle et verra ses pouvoirs de contrôle et de sanction renforcés. Je souhaiterais aussi que le CSA ait l’obligation de consulter les téléspectateurs citoyens à travers de la constitution de panels consultatifs qui rendraient des avis plusieurs fois dans l’année, sur le modèle du régulateur britannique ou d’un colloque annuel "Les états généraux du CSA" qui confronterait associations (parents, handicapés, minorités) et représentants des opérateurs (journalistes, producteurs...).

Ségolène Royal

reçu le 16 Avril 2007

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